L’intelligence relationnelle facilite les collaborations

« L’appartenance à un groupe suppose des liens de confiance réciproques »[1]. Or la confiance part de soi (faire confiance) pour s’installer (avoir confiance).

L’intelligence relationnelle est une gestion des situations qui permet des actions posées avec discernement (en s’écoutant, soi et l’autre). Lâcher prise des conditionnements, des réactions instinctives, guidées par les peurs, donne la possibilité d’expérimenter cette intelligence collective.

Quelles sont ces réactions instinctives ?

Les Neurosciences Comportementales nous expliquent que nous partageons avec les animaux un mode de fonctionnement mental (reptilien) qui dirige nos réactions instinctives en fonction du danger ressenti.

Cela nous permet de réagir plus vite aux dangers grâce à nos instincts que ne le permettrait une réflexion plus circonstanciée. Cependant, nos instincts ne nous « habituent » pas, en situation de stress qui les déclenche comme le ferait un danger réel, à gérer intelligemment les conflits, mais plutôt à les éluder de 3 manières possibles :

–  La fuite … amène à considérer le conflit comme une limite relationnelle infranchissable. Alors, la relation ne vaut que par ce qui est commun entre les personnes. Ce qui diffère gène, agite, angoisse. Cela a pour corollaire le fait que les relations ne peuvent, sur cette base de fuite, pas aller en s’élargissant et donc rétrécissent avec le temps. Le problème empire lorsque la fuite entraîne le choix de l’indifférence. Il n’y a rien de pire en relation que l’indifférence. Elle est une non relation.

Cela revient à ne pas s’autoriser à être soi et ne pas autoriser l’autre à être lui. C’est la logique du conformisme. S’ouvrir, se laisser surprendre, est alors un choix difficile et courageux. A défaut d' »avoir confiance », « faire confiance » en sa capacité à surmonter les conflits libère de la fuite.

–  La lutte … fait décider pour les autres, parce qu’au fond on a peur d’être jugé, critiqué. On se prémunit des décisions des autres en décidant pour eux. Le conflit n’est pas considéré, en situation de stress, pour sa valeur transformationnelle, puisque un avis contraire, différent, ne peut pas être accepté. Les personnes en lutte parlent en normes, en droit, en « raison ou tort ». Il faut punir plutôt que de risquer d’être puni soi même. La valeur centrale c’est la force vis-à-vis de l’autre.

La force est aussi une énergie de construction et donc de collaboration, lorsqu’elle permet de s’engager pour un objectif pour soi et pour les autres accepté par tous. Il « suffit » donc de définir cet objectif pour libérer la lutte et en faire une force constructive.

C’est notamment l’objet des médiations de comités de directions autour de la vision de l’entreprise, qui sera ensuite partagée avec l’ensemble des collaborateurs. Une fois que le cadre est clarifié collectivement, il est plus facile de laisser chacun décider de soi.

–  L’inhibition … est l’état de la personne qui évite d’exprimer ses avis, au cas où ils seraient contraires à ceux des autres et choisissent pour s’en protéger de se soumettre aux plus forts. Cela revient à renier son propre avis et ainsi, se rendre victime de la situation et des autres. Cette posture est une façon de dépendre de l’autre. Ce qui libère l’inhibition, c’est de se considérer et de se faire respect (obtenir de l’attention).

Le processus de développement du dialogue par la médiation permet d’installer (ou de rétablir) le respect dans la relation.

Ces logiques instinctives installent ce que l’Analyse Transactionnelle appelle les jeux psychologiques. Notamment, le « triangle dramatique » persécuteur/victime/sauveur ou « triangle de  Karpman ». Ce sont des imbrications, des dépendances et contre dépendances, entre états du soi de Parents et d’Enfants, sans que les états Adultes ne prennent les commandes, interdisant l’autonomie. Cet éveil à ses responsabilités seul permet pourtant de collaborer c’est-à-dire de « participer à l’élaboration d’une œuvre commune ». Dans cette action commune, chaque individu est distinct, doué de capacités et de contributions possibles qui lui sont spécifiques.

Comme le montre le schéma ci-dessous, les « jeux psychologiques» mettent en scène des types schématisés de personnes et non des personnalités complexes réelles. Le déni de leurs individualités peut être dépassé par le dialogue, parce que celui-ci implique la considération des individus et non de schémas.

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Victime / Persécuteur / Sauveur est un jeu de transfert de responsabilité pour ne pas prendre les siennes, un manque de confiance en sa capacité à faire de son mieux, pour le mieux de la relation. De ces modes comportementaux découlent en effet les déviances relationnelles, comme l’emprise, la manipulation, le harcèlement, qui sclérosent les relations.

Il est plus efficace (intelligent) de prendre chacun sa place, sa responsabilité de la totalité de la relation que de définir qui a tort et qui a raison et de noyer le conflit dans une  « guerre froide ».

Il faut bien que quelqu’un commence, conscient de la difficulté d’être bienveillant le premier. Faire le premier pas vers le dialogue demande du courage, bien plus que de répondre à l’agression par l’agression. Ce courage est motivé par la recherche de sens : vouloir travailler mieux ensemble.

La question de trouver du sens à son activité professionnelle revient systématiquement dans les demandes de mes clients. Ce sens ne peut pas découler d’éléments extérieurs à soi, mais de la clarification de la place que chaque personne souhaite et peut occuper. Le travail de définition des motivations et talents permet de se positionner de manière à contribuer du mieux de qui l’on est, d’être épanoui et efficace.

La relation est le fait de tous les acteurs, elle est la responsabilité de chacun, c’est ce qui rend les relations humaines « complexes » et implique que les désaccords ou malaises soient considérés au cas par cas.

Encore faut il le vouloir, en avoir le courage et s’en donner les moyens. Encourager l’Intelligence Collective est mon métier, ma vocation.


[1]              François Balta, Gérard Szymansky, Moi, toi, nous… Petit traité des influences réciproques, éditions InterEditions, 2012, (203 pages), p. 71

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